Des amis se retrouvent sur une façon de fonctionner assez
voisine.
Hedwige : « Moi, j’ai fortement tendance à m’autocritiquer :
j’ai en permanence un tribunal dans ma tête, comme une petite salle d’audience
à l’intérieur de moi-même où se passent des jugements ; et la plupart du
temps, ces jugements sont négatifs. »
Gabin : « Pour moi, c’est le souci de perfection
permanent. J’ai toujours cru que tout le monde avait envie d’être parfait… Et
je me suis rendu compte que non, ce n’est pas du tout évident, on n’est pas parfait.
Je suis toujours dans l’autocritique, le doute, la colère. »
Émilienne : « Je suis comme toi, j’ai une attention
très forte aux petits détails : que tout soit rangé à la maison ; l’exigence
sur les résultats scolaires de mes enfants (j’étais institutrice avant…) Je
suis dans la peur de l’échec et l’autocritique en permanence : j’aurais pu
mieux faire… j’aurais dû mieux faire… »
Désiré : « J’ai en moi une jauge permanente, une
évaluation incessante de toute situation, de toute action à prendre. Au
travail, ça n’est remis que si j’estime que c’est parfait. Si quelqu’un fait
une critique sur ce travail, pour moi c’est une critique personnelle. Mais je
ne le montre pas ; je le garde à l’intérieur, car ça ne se fait pas. »
Avoir un regard critique sur soi, c’est une bonne chose, à
condition que cette autocritique ne dépasse pas un certain seuil que je
qualifierai de destructif. Être critique par rapport à soi-même, c’est être
capable de discerner et de reconnaître ses propres limites. Cela s’inscrit dans
la reconnaissance de la finitude humaine en général, et de la sienne propre en
particulier. L’autocritique qui me permet de reconnaître mes erreurs tout en
conservant l’idée que je demeure perfectible est une démarche constructive :
elle me permet de discerner et de mettre en œuvre, seul ou avec l’aide de
tiers, des améliorations possibles dans mes attitudes et comportements. Par
contre, en dépassant ces limites, en me dévalorisant sans cesse, je risque de
tomber dans un excès nocif, à la fois pour moi-même et pour les autres.
L’autocritique constante est souvent liée au
perfectionnisme, ce souci d’être parfait dans tous les domaines et en toutes circonstances.
Ce type de fonctionnement génère souvent anxiété et frustration, aussi bien au
travail que dans la vie personnelle et sociale, ainsi qu’une colère souvent
contenue mais parfois explosive. Perfectionniste, j’ai l’impression de ne jamais
en faire assez, de toujours pouvoir et devoir faire mieux, et je développe un
sentiment diffus de culpabilité. Il m’arrive de me sentir coupable pour avoir négligé
des détails que les autres ne perçoivent même pas ; d’ailleurs, dans la plupart
des cas, ils ne comprendraient pas, même si je leur montrais. Car ce juge
impitoyable est à l’intérieur de moi-même.
Accepter de ne pas être parfait, faire du mieux possible et prendre avec simplicité – voire avec humour – les erreurs ou les imperfections résiduelles, c’est une façon de vivre plus harmonieusement ce que j’ai à vivre.
Renaud CHEREL
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Faut-il chercher la perfection?
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