Réflexions d'un coach spécialisé dans les transitions, à partir des événements et rencontres de la vie quotidienne...

mardi 30 mars 2010

Histoire de changer

L'imaginaire des artistes nous montre comment des changements progressifs
peuvent aboutir à une transformation radicale.
Pendant très longtemps en Occident, on s’est appuyé sur la notion de stabilité. La vision de l’univers était simple : la terre était au centre et tout tournait autour d’elle. Le cosmos était une horloge bien huilée ; les planètes et les étoiles étaient fixées sur des sphères dont le mouvement autour de la terre était parfaitement rôdé et prévisible : pas de changement.

Le cosmos est bien loin de nous, me direz-vous ; mais le même ordre, la même constance était recherchée dans la vie : chaque personne avait une place bien définie dans la société, le métier se transmettait de génération en génération, l’existence était réglée par des coutumes sinon immuables, du moins peu modifiables. Il était difficile pour un individu de sortir de la voie qui lui était tracée depuis sa naissance par son environnement, sauf exception bien entendu.

Et puis ce bel ordre immuable s’est trouvé ébranlé, à la fois par la découverte de peuples aux coutumes complètement différentes et par l’avancée des sciences dans tous les domaines. « Et pourtant, elle tourne ! » s’exclame Galilée à propos de la terre, quand il découvre qu’elle tourne autour du soleil. Notre vision du monde a complètement changé. À partir du moment où l’on admet que les choses ne sont plus fixes mais en constant changement, notre interprétation des faits se modifie. Aujourd'hui, nous sommes héritiers de la théorie de la relativité générale et de la théorie quantique, qui font une place énorme à la notion de changement. Nous admettons, du moins en théorie, que tout change, que rien n’est constant.

Le psychologue américain Frederic Hudson propose de changer selon quatre principes :

1. Linéaire - Cyclique
Autrefois on pouvait imaginer sa vie linéairement, comme un fleuve. Aujourd'hui une personne va avoir en moyenne trois ou quatre activités professionnelles successives dans sa carrière ; il peut être alors plus utile de prendre un modèle cyclique que linéaire. La vie est alors représentée par une série de cycles que l’on va successivement traverser.

2. Dedans - dehors
Aujourd'hui, l’individu est davantage amené à se poser des questions du type : «Qu’est-ce je vais faire dans ma vie ? » Il a davantage de possibilités de choix, moins de repères externes, plus de repères internes, ce qui peut éventuellement générer plus d’anxiété. D’où l’intérêt d’avoir un coach pour être accompagné à certains moments clés.

3. Le besoin continu de formation
Autrefois, on suivait une formation quand on était enfant, et celle-ci était utile tout au long de la vie. Aujourd'hui, non seulement la durée des études s’est allongée, mais on a besoin d’apprendre en permanence, car les références du passé ne fonctionnent plus dans un certain nombre de domaines. Il est donc indispensable d’apprendre à apprendre.

4. L’auto-renouvellement
Aujourd'hui, dans beaucoup de domaines, on se rend compte que la croyance en la permanence est une illusion – ce qui rejoint certains courants de pensées orientaux comme le Taoïsme. C’est le changement et même le chaos qui dominent. Et dans ce monde changeant, le fait de s’appuyer sur des valeurs fortes est un atout non négligeable. Quelles sont mes valeurs ?

Renaud CHEREL



Voir aussi dans ce blog :
    Permanence et changement
    Résistance au changement
    Périodes de transition

lundi 29 mars 2010

Permanence et changement

Sandrine traverse une période délicate de changement dans sa vie. Elle a décidé de se faire accompagner par un coach, qui va l’aider à trouver en elle-même les ressources nécessaires pour opérer ce changement.

Mais parler de période de changement implique qu’en dehors de cette période, Sandrine reste Sandrine, égale à elle-même. Sachant que toutes les cellules de son corps se renouvellent à un rythme relativement rapide – sauf les cellules nerveuses, qui changent aussi, mais beaucoup plus lentement – et que la plupart d’entre elles n’existaient pas il y a six mois, comment peut-elle affirmer sa permanence en tant que sujet ? Est-ce que Sandrine est réellement la même personne, ou bien est-elle différente de ce qu’elle était il y a six mois, il y a un an, dix ans ? Quel rapport y a-t-il entre l’enfant qu’elle était à l’âge de cinq ans et l’adulte qu’elle est aujourd'hui ? Son voisin Paul qui a sombré récemment dans la dépression est-il le même que celui qu’elle connaissait l’année précédente, plein de joie et d’optimisme ?

Toutes ces questions, bien évidemment, des millions de gens les ont posées avant nous. Car la vie est mouvement, changement ; et ce qui ne change pas meurt inexorablement. On pourrait répondre que l’unité de l’individu est un trompe-l’œil, une illusion ; chaque personne est en réalité une foule, une construction de milliards de cellules différentes en perpétuel changement, en réaménagement constant. Une autre proposition de réponse est l’approche de la Gestalt : le tout est bien plus que les parties qui le constituent, il est d’une autre nature ; ainsi, le tout demeure au-delà de l’aspect transitoire de ses parties.

Edgar MORIN utilise une image très parlante à ce propos : le tourbillon dans un torrent nous semble stable, alors qu’il est changeant à tout instant, puisque les particules d’eau qui le composent ne font qu’y passer ; tout en étant stable il n’est jamais le même, et son existence même dépend du flux de l’eau qui le constitue : que le flux d’eau s’arrête, et le tourbillon disparaît, il meurt.

Souvent, dans la rencontre entre un flux et un obstacle, il se crée un tourbillon, c'est-à-dire une forme organisée constante et qui se reconstitue sans cesse elle-même (…). C’est dire qu’un ordre organisationnel (tourbillon) peut naître à partir d’un processus qui produit du désordre (turbulence).
Edgar MORIN, Introduction à la pensée complexe

Mais la question demeure : ce tourbillon est-il une entité en soi, ou bien n’est-ce qu’un concept, créé par l’observateur ? À beaucoup d’égards, nous sommes comparables à ce tourbillon ; notre être matériel dépend entièrement des flux entrants et sortants : flux d’air, de nourriture, etc., mais aussi flux d’informations, d’émotions, de choses partagées... Donc ce qui me constitue au plus intime corporellement ne serait-il en réalité qu’un ensemble éphémère et changeant ?
La permanence de l’individu ne serait-elle alors qu’un leurre, un artefact ? À moins que ce rôle ne soit dévolu à ce qu’on appelle l’âme ?... à chacun de répondre…

Renaud CHEREL


Voir aussi dans ce blog : 
    Histoire de changer
    Changement et blocages
    Résistance au changement
    Déménagement
    Comment gérons-nous l'imprévu ?
    Changer d'habitude
    Nomades et sédentaires

jeudi 25 mars 2010

Visions du monde

Notre vision du monde n’est pas le monde : cette affirmation peut sembler ridicule de banalité, et pourtant… dès qu’on cherche à gratter la surface des choses, on se rend vite compte du fait suivant : l’on a facilement tendance à penser que le monde est réellement ce que nous croyons qu’il est. Je vois, je touche, j’entends ces choses, donc elles sont vraies, et elles sont vraiment comme je les perçois. Du coup, je m’étonne que les autres ne soient pas d’accord avec moi, même parfois sur des points qui me semblent tellement évidents… Il me faut faire un minimum d’effort pour réaliser que chaque personne a sa propre vision du monde, et que ma vision est différente de celle des autres. Prenons un exemple :

Amélie et Daniel, Myriam et Jack ont passé une semaine de vacances ensemble à la neige, dans un chalet qu’ils ont loué. Amélie le trouve très cosy ; elle était vraiment contente de partager des moments chaleureux avec ce petit groupe qu’elle connaît depuis longtemps. Daniel, lui, a apprécié surtout la proximité des pistes ; il a eu la satisfaction d’avoir amélioré ses performances depuis l’année passée. Myriam a trouvé ce chalet un peu tristounet ; elle se pose des questions sur sa relation avec Jack, qui lui semble lointain depuis quelque temps. Quant à Jack, il n’a pas trop fait attention au chalet, il ne saurait même pas le décrire : il était préoccupé par le prochain rachat de son entreprise par un concurrent…

Supposons maintenant que vous vouliez savoir comment était ce chalet en montagne… selon la personne à qui vous aurez posé la question, l’image que vous en recevrez sera bien différente ! Ce genre d’expérience, nous le vivons tous les jours, et pourtant… Combien de fois nous arrive-t-il de croire que notre vision du monde est réellement le monde ?... Et ne nous arrive-t-il pas d’essayer de persuader les autres que c’est la vraie ?

Nous ne percevons donc pas le monde tel qu’il est : tout ce que nous voyons, tout ce que nous entendons, tout ce que nous sentons et goûtons, tout cela est coloré, influencé par notre histoire personnelle, par ce que nous avons vécu, expérimenté auparavant. De plus, notre représentation du monde est fortement influencée aussi par notre culture, notre époque, le milieu social dans lequel nous évoluons.

Et alors, me direz-vous, qu’est-ce que ça change ? Eh bien, cela change énormément de choses dans nos rapports avec les autres ! A partir du jour où je comprends vraiment que ma représenta-tion du monde n’est pas le monde, je suis amené à admettre que la représentation de l’autre a de la valeur. Il me sera plus facile de tenter de comprendre son point de vue, même si comprendre l’autre ne signifie pas approuver, être d’accord avec, avaliser ses décisions.
Admettre que ma vision du monde n’est pas le monde, c’est aussi admettre la différence de points de vue, et c’est à partir de là que naît le dialogue.

Renaud CHEREL


Voir aussi dans ce blog : 
    Points de vue
    Notre vision du monde n'est pas le monde
    Observation et jugement
    Reformulation
    Point aveugle
    Le langage influence-t-il notre pensée?
    Qu'est-ce que la vérité?


mardi 23 mars 2010

Les atouts de nos émotions

Nous avons vu dans le message précédent (voir Les émotions) l'importance des émotions dans notre vie. Les émotions ne sont ni bonnes, ni mauvaises en soi : tout dépend de ce que j’en fais, quel comportement j’adopte… Très souvent, ce que nous percevons comme défauts, ou comme faiblesses, ce sont les excès de comportement qui en découlent et non pas les émotions elles-mêmes.

En y regardant de près, chaque état de défense évoqué semaine dernière est aussi une force, qui lui correspond comme les côtés pile et face de la même pièce. L’usage modéré, non excessif de l’émotion nous donne accès à cette force.

Ainsi, le côté positif de la réaction agressive liée à la colère, c’est l’action, l’efficacité, la capacité de trancher, de décider…
Le côté positif de la réaction de repli liée à la tristesse, c’est l’envie de comprendre, la réflexion, l’analyse et la synthèse…
Le côté positif de la réaction d’agitation liée à la peur, c’est la capacité de rebondir, de prendre des initiatives, d’imaginer des solutions…

Par ailleurs, nos émotions sont des outils puissants si l’on sait les mobiliser au moment opportun. Ainsi, en faisant appel à une émotion positive de maîtrise et de confiance en elle, Julie pourra faire face à sa situation de stress, grâce à la technique d’ancrage acquise en coaching, et Jean pourra canaliser sa colère.

Le Message TU
Le message TU est la plupart du temps utilisé spontanément. C’est ainsi que Jean s’adressait à Corinne :
« Corinne, TU me reproches sans arrêt… (jugement)
« TU me scies le dos, tu m’énerves… (sentiment)
« TU ne pourrais pas arrêter un peu ton cinéma ? (changement de comportement)
Corinne se sent injustement accusée. Bien souvent, le message TU tue la communication !

Le Message JE
L’idéal, c’est de nommer l’émotion en question, ce qui permet à l’interlocuteur de comprendre ce qui se passe. Prendre la responsabilité de ce qui se passe en soi.
« Corinne, JE me suis senti en colère… (sentiment)
« quand TU m’as demandé… (comportement)
« parce que JE me suis dit que tu me reprochais… (interprétation)
« et ce que JE demande à l’avenir c’est de… (changement)

Le message JE est très efficace à condition d’être clair et précis : Jean prend bien soin de nommer le sentiment précisément ; il explique clairement l’interprétation qu’il attribue au comportement de Corinne ; il est spécifiques sur ce comportement (c’était tel jour, à tel moment) et sur le changement souhaité. Surtout, il évite de généraliser « tu es toujours ceci ou cela… » : ainsi, il n’enferme pas Corinne dans un stéréotype, mais au contraire lui fait savoir qu’elle conserve sa liberté d’agir en face de lui.

Le Message JE, bien utilisé dans la communication de couple, fait des merveilles. Mais il est efficace aussi dans d’autres contextes, en particulier le domaine professionnel !

Selon Daniel Goleman, la capacité à bien gérer nos émotions est une forme particulière d'intelligence, l'intelligence émotionnelle. Et, bonne nouvelle, celle-ci peut se développer en mettant en place des apprentissages, comme toute forme d'intelligence !

Voir aussi dans ce blog :
    La joie
    Comment cultiver nos formes d'intelligence
    Intuition

Bibliographie : 

Aimelet-Perissol Catherine : Comment apprivoiser son crocodile, éd. Robert Laffont, Paris 2002.

Après avoir passé en revue les principales émotions, l’auteure propose une approche concrète de la gestion de ses émotions, avec des exercices facile à mettre en œuvre. Intéressant et pratique, même si certains fondements théoriques utilisés dans ce livre sont considérés aujourd'hui comme un peu dépassés.





Goleman Daniel : L’intelligence émotionnelle, éd. Robert Laffont, 1999. Éd. originale : Emotional Intelligence - Why it can matter more than IQ, Bantam Books, New York 1995 – 358 pages. 




Existe aussi en format Poche.


L’intelligence n’est pas qu’une question de QI. Dans ce livre qui est devenu un bestseller international, Goleman montre que notre perception de l’intelligence est bien trop étroite et met en évidence d’autres capacités qui ont des conséquences énormes sur la façon dont nous menons notre vie et interagissons avec les autres.