Réflexions d'un coach spécialisé dans les transitions, à partir des événements et rencontres de la vie quotidienne...

lundi 26 mai 2014

Réussir sa vie


Trois amis discutent sur la notion de « réussir sa vie ».

« Attention, affirme Virginie, il ne faut pas confondre "réussir sa vie" et "réussir dans la vie", ce n’est pas la même chose ! »

-« Je ne vois pas trop la différence entre les deux, lui rétorque Mériadec. L’important, pour moi, c’est de réussir professionnellement, de gagner suffisamment d’argent pour faire ce que je veux, et d’être reconnu par les autres à ma juste valeur. Mais pour y arriver, je dois accepter de rogner sur mon temps libre et ma vie familiale. »

-« Ok, le boulot c’est important, je suis d’accord, répond Virginie. Mais, honnêtement, je ne cherche pas à atteindre le sommet de la pyramide et je ne sacrifierai pas les autres aspects de ma vie. Ce qui compte le plus pour moi pour réussir ma vie, c’est une vie de famille harmonieuse, des amis sur qui je peux compter, du temps libre pour vivre en relation avec mes proches. »

-« Vu le temps qu’on passe au travail, autant qu’il ne soit pas trop désagréable, explique Sylvette. C’est pourquoi je privilégie les bonnes relations avec mes collègues : c’est un élément très important. Sinon c’est l’enfer, j’en vois plein autour de moi qui sombrent dans la déprime : tu crois que c’est une vie réussie ? »

L’expression « réussir sa vie » a-t-elle un sens ? En effet, réussir, c’est aboutir avec succès à un résultat jugé positif : par exemple, on peut réussir au Bac en travaillant les matières concernées pour obtenir une note supérieure à la moyenne. Dans un domaine plus qualitatif, on peut réussir son flan au caramel, parce qu’on connaît la recette et qu’on obtient le résultat gustatif attendu. Mais réussir sa vie, c’est autre chose : notre vie ne peut pas se réduire à un examen à passer ou à un plat à consommer. L’objectif à atteindre n’est pas clairement défini, et il ne semble pas y avoir de recette toute faite. D’autant plus que nous sommes soumis à de nombreux événements extérieurs sur lesquels nous n’avons pas ou peu d’influence.

Le fait de « réussir dans la vie » est lié à un affichage social ; par contre, « réussir sa vie » tient davantage à la réalisation de ses propres valeurs internes. Quand on consulte les résultats de sondages sur cette question, on constate qu’une écrasante majorité d’entre nous privilégient une vie familiale et sociale épanouie : famille heureuse, temps libre, vie amicale. Les moyens privilégiés pour y accéder passent par : « donner du bonheur à d’autres » et « savoir se satisfaire de ce que la vie vous offre ». En France, une minorité de personnes est prête à sacrifier ces aspects au bénéfice de la seule réussite professionnelle ou sociale.

Il est très difficile de répondre de manière générale à ce type de question car les réponses sont extrêmement subjectives et dépendent de la façon dont chacun évalue sa situation et la compare à celle de ses semblables. Et vous, pensez-vous réussir votre vie ?


Renaud CHEREL


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lundi 19 mai 2014

Comment éviter les gaffes



Certains d’entre nous sont plus sujets que d’autres à commettre des « bourdes », des maladresses sociales ou matérielles qui peuvent avoir des conséquences désagréables, à la fois pour soi et pour les autres. Est-il possible de supprimer, ou au moins de diminuer la fréquence de tels actes manqués ?


Selon les conceptions de la psychanalyse, l'acte manqué est en quelque sorte un acte réussi, puisque le désir inconscient qui était sous-jacent a fini par s’exprimer. La personne croit échouer, mais au fond elle a satisfait son désir inconscient.

Plusieurs approches peuvent permettre de limiter la répétition de ces actes manqués.

La première consiste à identifier, à repérer quel peut être le désir inconscient qui cherche à se satisfaire par l’intermédiaire de la maladresse commise. Le fait d’amener à la conscience ce qui n’y était pas peut dédramatiser la chose et permettre de mettre en place des stratégies constructives. Si Yoann peut retrouver la raison pour laquelle il en veut à son client, si Olivia peut regarder en face sa peur de la douleur et Nancy reconnaître la rivalité qui l’oppose à sa belle-sœur, et si Mathieu peut identifier le sentiment qu’il éprouve envers Arielle, chacun d’eux aura fait un premier pas vers la solution de son problème.


Notons cependant que cette identification n’est pas toujours aisée : notre inconscient ne se dévoile pas si facilement, et il peut arriver que d’autres, mieux que nous-mêmes, arrivent à discerner ce qui se passe en nous. C’est pourquoi le recours à une tierce personne peut nous être utile, en prenant soin de bien choisir cette personne : ami(e) ou proche – à condition d’avoir un regard bienveillant – médecin, coach, psychothérapeute…

Une technique préconisée par certaines approche – comme la PNL – consiste à visualiser la scène lors de laquelle on redoute de commettre des maladresse : l’entrevue d’embauche redoutée, la rencontre avec tel client stratégique, l’explication avec le conjoint ou les beaux-parents sur un point délicat… Au lieu d’éviter d’évoquer la situation que l’on craint, il s’agit au contraire de la visualiser comme un film, qu’on déroule mentalement de manière favorable. En se projetant le film plusieurs fois dans sa tête, on créera des conditions intérieures plus favorables et on augmentera les chances que tout se passe bien.


Une autre approche consiste à agir sur le corps, dont les tensions retentissent sur notre fonctionnement psychique. Il s’agit de créer un calme physique qui, tout naturellement, procurera un calme intérieur. On pourra utiliser pour cela les techniques de respiration et de méditation, la pratique régulière du yoga ou du tai-chi, la marche ou la pratique d’un sport ou même simplement le fait de s’isoler dans un lieu tranquille avant d’entrer dans la situation redoutée.


Enfin, si malgré toutes ces précautions, le lapsus est commis, la gaffe est réalisée, la façon dont nous réagissons peut faire la différence. Dans certaines circonstances, le fait de rester naturel, de continuer sur sa lancée peut être la meilleure solution. Dans d’autres, il est préférable d’assumer sa maladresse en reconnaissant qu’elle était provoquée justement par la peur de froisser l’autre.


Renaud CHEREL


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    Actes manqués

lundi 12 mai 2014

Actes manqués

Yoann a envoyé à son directeur commercial la copie du mail qu’il vient d’expédier à un client important, assortie d’un commentaire peu flatteur sur celui-ci. Malheureusement, il s’aperçoit avec consternation qu’en voulant faire vite, il a mis le client en question comme destinataire.


Au moment d’aller chercher sa fille à la sortie de l’école, Olivia réalise qu’elle a complètement oublié son rendez-vous chez le dentiste en début d’après-midi. Elle rappelle le cabinet pour reprendre un rendez-vous, mais comme elle a un peu honte de son oubli, elle invente une excuse en expliquant qu’elle était obligée de garder sa fille malade à la maison.

En cadeau d'anniversaire, Nancy a reçu un vase en porcelaine de la part de sa belle-sœur. Le lendemain, au moment d’y mettre des fleurs, elle fait un geste maladroit et renverse le vase qui se fracasse sur le sol de la cuisine. Nancy en est vraiment désolée et décide de ne pas en dire un mot à sa belle-sœur.

Nancy a-t-elle vraiment renversé le vase par hasard ?
En rentrant chez lui, suite à une visite chez Arielle, une connaissance, Mathieu s’aperçoit qu’il a oublié son parapluie chez elle. Il en est ennuyé car la météo annonce une semaine pluvieuse et cette personne habite assez loin de chez lui…

Ces erreurs, ces petits « ratés » dans la vie quotidienne sont appelés actes manqués. Il y a plus de 100 ans, Sigmund Freud a montré qu’ils n’étaient pas le fruit du hasard, mais plutôt la révélation involontaire de ce qu’on ne peut pas – ou n’ose pas – exprimer consciemment. Il se crée un conflit intérieur entre un désir inconscient et la volonté consciente, et l’acte manqué constitue un compromis pour tenter de résoudre ce conflit.

Reprenons nos exemples.
Yoann avait peut-être envie d’exprimer directement à son client tout le mal qu’il pensait de lui, mais les règles commerciales lui interdisaient de le faire. Son erreur lui a permis d’atteindre ce but.

Si Olivia a oublié son rendez-vous, c’est que la perspective d’une séance chez le dentiste n’était probablement pas très agréable pour elle et lui faisait peur. Son oubli lui a permis de réaliser son désir inconscient : éviter de souffrir.

Au fond, Nancy en a toujours secrètement voulu à sa belle-sœur de lui avoir « volé » son frère, dont elle était très proche. En cassant le vase, n’exprime-t-elle pas le fait qu’elle ne veut rien recevoir de sa belle-sœur ?

Sans se l’avouer vraiment, Mathieu éprouve plus que de la sympathie pour Arielle. Son oubli involontaire va créer une occasion supplémentaire de retourner chez elle et de lui parler, ce qui constitue finalement une perspective très agréable…

Certaines personnes sont coutumières de ces actes manqués et collectionnent les oublis, mais aussi les bourdes et les gaffes au point d’en subir des conséquences sociales ; d’autres le sont moins. La fatigue, le stress, le défaut d'attention, en diminuant le contrôle sur soi, peuvent favoriser la production d’actes manqués. L’usage d’alcool ou de drogues accentue encore cette tendance, bien évidemment.

Peut-on corriger, ou au moins diminuer cette propension ? Oui, nous le verrons dans le prochain article. 

Renaud CHEREL



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lundi 5 mai 2014

L'enchantement du monde

La pensée magique est un mode de pensée spontané de l’être humain, dont Max Weber disait qu’elle est un « enchantement du monde ». Non pas dans le sens d’émerveillement, mais d’ensorcellement, de mise sous le sortilège. 

Dans notre société largement désenchantée, deux domaines cependant font un usage assez intensif de la pensée magique : la publicité et la politique. Dans la publicité actuelle, on ne vend pas un produit mais un concept : par exemple la jeunesse, le naturel, le dépassement de soi ou la sécurité. En achetant le produit, le client acquiert la qualité vantée par la publicité. En politique, il est facile de déraper vers une forme de pensée magique en invoquant des formules incantatoires peu rationnelles. Dans les batailles électorales, combien voit-on de slogans garantissant de changer les choses comme sous le coup d’une baguette magique, ou d’affirmations péremptoires promettant de faire disparaître tous les obstacles ? En croyant que la parole incantatoire ait quelque chose à voir avec l’acte, et même qu’elle peut le suppléer, on est dans la pensée magique.

La pensée magique va souvent s’accompagner d’un peuplement du monde par des entités animées, représentant une opposition entre les forces du bien et celles du mal. Ainsi les mythologies de toutes les civilisations anciennes, qui peuplaient le ciel de dieux et déesses aux traits de caractère et aux émotions comparables aux humains. Les légendes de beaucoup de contrées font vivre des personnages tels que lutins des bois, farfadets, fées, elfes, nains, korrigans, ondines des lacs et rivières, sirènes des mers, gobelins, esprits frappeurs… sans oublier les vampires et autres créatures de la nuit, qui tous se comportent peu ou prou comme des humains.

L’attribution de caractéristiques humaines à des événements, des objets ou des animaux est nommée anthropomorphisme par les spécialistes. Cette propension peut être très banale : ainsi, cet homme qui donne un coup de pied à sa voiture en s’exclamant : « Qu’est-ce qu’elle a ? Elle ne veut pas démarrer ce matin ! » ou cette femme qui projette très spontanément sur son chat ses propres sentiments – alors que, très objectivement, il n’est pas possible de savoir ce qui se passe dans la tête d’un animal, fût-ce celui qui partage notre quotidien.

Cette propension naturelle à prêter des traits humains aux animaux a beaucoup été utilisée dans la littérature : on peut penser par exemple aux fables d’Ésope ou de La Fontaine, dans lesquelles le lion est autoritaire et magnanime, le renard est rusé et fourbe, etc. À notre époque, le cinéma et la télévision ont repris cette veine, avec les dessins animés de Walt Disney, les cartoons américains et de nombreux jeux vidéo. Mais, contrairement à la politique, on est là dans un univers ludique qui interfère moins directement avec la réalité.

Dans la série noire de BD "Blacksad", l'illustrateur Guarnido joue à merveille
des stéréotypes animaux : ici, les malfrats sont figurés par des reptiles.
La pensée magique, sous différentes formes, fait donc partie de notre quotidien. « Pas de quoi fouetter un chat », me direz-vous. Sans doute ; mais le fait d’en prendre conscience peut nous aider à mieux vivre en adultes libres et responsables.


Renaud CHEREL


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    Pensée magique

Bibliographie :
Les Fées, de Brian Froud et Alan Lee, Albin Michel, 1979. Ce livre, richement illustré de magnifiques dessins et aquarelles, explore et évoque le royaume de Féerie tel que décrit dans les mythes et légendes de différents pays, essentiellement de culture celtique ou anglo-saxonne. Sa lecture est un pur divertissement.