Deux couples déjeunent au restaurant.
-« Je prendrais bien du dessert, il y a des
profiteroles au chocolat… suggère Régine.
- Non, on n’a pas le temps, on a encore une heure de route à faire et je
ne veux pas être en retard ! rétorque Samuel, son compagnon.
- Allez, s’il te plait, fais-moi plaisir ! minaude-t-elle.
- Bon d’accord, mais on se dépêche…
- Dépêche-toi surtout parce qu’il n’en reste que deux, intervient
Mireille. Moi, je m’en réserve déjà une…
- Tu n’avais pas commencé un régime, Mireille ? s’étonne Kevin.
- Oui, mais bon, je peux tricher de temps en temps. Toi, prends donc une
glace, les gens de la table d’à côté ont l’air de s’en régaler. »
Une grande part de notre communication consiste à tenter
d’emporter l’adhésion d’un interlocuteur (particulier ou collectif). Pour ce
faire, nous pouvons utiliser de très nombreux outils, que l’on pourrait ranger
dans deux grandes familles : d’une part ceux qui s’adressent à la raison –
on parle alors de l’art de convaincre – et d’autre part ceux qui s’adressent
aux émotions – on parlera alors des moyens de persuasion ou de suggestion,
cette dernière agissant de façon moins consciente.
La conviction relève de la raison et sollicite le
savoir ; elle s’appuie sur une démarche, un raisonnement, une
démonstration qui vont aboutir logiquement à la conclusion proposée. Ainsi,
dans notre exemple, Samuel explique les raisons de son impatience.
De l’autre
côté, la persuasion sollicite les désirs, les attentes, les rêves ou les
émotions du destinataire, de façon à obtenir son adhésion spontanée et
affective. C’est ainsi que Régine joue sur l’affectif pour persuader son
compagnon d’attendre un peu. Mireille, elle, joue sur le manque pour renforcer
le désir de Régine, et sur le consensus pour suggérer le choix de son dessert à
Kevin. Quant à ce dernier, il met en lumière le manque de cohérence de
Mireille, qui a déclaré vouloir faire un régime. Ce souci de cohérence, que le
sociologue Leon Festinger a mis en évidence dans ses études sur la « dissonance
cognitive », est un moteur puissant. Aussi Mireille trouve-t-elle une
parade pour se justifier.
Il s’ensuit qu’on sera davantage persuadé pour des raisons
personnelles, alors que l’on acceptera plus volontiers d’être convaincu par les
raisons d’autrui.
Cependant, cette distinction entre conviction et persuasion
est quelque peu artificielle : en réalité, ces deux types de moyens sont
utilisés dans la plupart des communication, et sont parfois tellement imbriqués
l’un dans l’autre qu’il est difficile de les démêler. On pourrait penser, par
exemple, que les scientifiques vont essentiellement chercher à convaincre, au
contraire des professionnels de la vente centrés uniquement sur la persuasion.
Pourtant, l’expérience ne corrobore pas cette affirmation : dans leur communication,
les savants ne négligent pas les effets de persuasion, et l’on sait combien les
émotions colorent les débats entre experts, jusqu’à les amener parfois au
conflit ouvert. Inversement, les techniques de persuasion utilisées dans le
domaine commercial s’appuient souvent sur un socle d’éléments rationnels.
La réalité est donc plus nuancée que nos modèles… Vous ai-je
convaincu ?
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Moyens pour influencer autrui
Renaud CHEREL
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