Dans le précédent article, nous avons abordé les notions de néophobie
et de néophilie, recul ou attrait par rapport à la nouveauté : celles-ci
ont des répercussions importantes dans la vie sociale. Dans la société, en
effet, on a coutume de différencier les individus qui ont tendance à se montrer
néophobes, qualifiés de « conservateurs », et ceux qui sont plutôt
néophiles, les « progressistes ». Les uns et les autres s’organisent
en associations, en mouvements, en partis politiques souvent antagonistes.
Cependant,
si l’on prend un peu plus de hauteur, on en vient à constater que bien souvent
dans la vie des sociétés humaines, des périodes plus néophiles alternent avec
des périodes plus néophobes. La société chinoise, dans laquelle le changement
et l’innovation ont été considéré comme extrêmement négatifs pendant des
siècles, notamment sous l’influence d’une certaine interprétation du confucianisme,
est brutalement entrée dans une période néophile il y a quelques décennies.
Notre société occidentale a elle aussi connu ce type d’alternance : le
Moyen-âge était plutôt néophobe, la Renaissance et la période actuelle sont
allègrement néophiles.
Le confucianisme a favorisé la tradition contre l'innovation. |
Même si certains individus sont globalement plus attirés par
la nouveauté et d’autres par la tradition, il nous faut reconnaître que la
frontière entre néophobe et néophile passe à l’intérieur de chacun de
nous : n’avons nous pas tendance à nous reposer sur la sécurité de choses
acquises dans certains domaines, sans chercher à les remettre en question, et
par ailleurs à rechercher la nouveauté dans d’autres ? De plus, pour la
plupart, nous évoluons au cours de notre vie : jeunes, nous sommes
généralement plus néophiles, plus à l’affût de la nouveauté. Inversement,
lorsque nous avançons en âge, nous avons davantage tendance à nous fier à notre
expérience et à nous installer dans certaines habitudes sécurisantes.
D’ailleurs, les grandes inventions ou découvertes ont pour la plupart été
réalisées par des personnes jeunes, même s’il existe de nombreuses exceptions à
cette tendance. Thomas Edison, par exemple, déposa son dernier brevet à l’âge
de 83 ans.
Thomas Edison, un esprit inventif jusqu'à la fin de sa vie. |
En conclusion, ne portons pas trop rapidement de jugement
sur les personnes ou les groupes dont le comportement en matière de nouveauté
ne correspond pas au nôtre : c’est de sa diversité que naît la richesse de
tout groupe humain !
Renaud CHEREL
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