Le sentiment d’abandon est souvent lié à une expérience
douloureuse précoce, dont on n’a pas fait le deuil et dont le souvenir persiste
sans que nous en ayons conscience.
Pourtant, une telle expérience – ressentie, mais pas
forcément réelle – peut aussi s’avérer positive. Il ne manque pas d’exemples
des personnes qui, après avoir été abandonnées d’une façon ou d’une autre dans
leur enfance, ont magnifiquement rebondi et ont su faire preuve d’ingéniosité,
de courage pour surmonter les épreuves de la vie. Je pense à Anny Duperey qui a
perdu ses deux parents accidentellement alors qu’elle était âgée de huit ans et
demi. Autrement dit, la séparation leur a servi à gagner en autonomie, malgré
les conditions brutales dans lesquelles elle s’est produite. Ils ont pu alors
rebondir en faisant appel à leur créativité pour inventer des solutions
nouvelles face aux problèmes auxquels ils furent confrontés par la suite, être plus résilients.
Inversement, des enfants surprotégés par leurs parents ou
leur entourage peuvent se trouver ensuite démunis face aux aléas de
l’existence. Faut-il alors aller jusqu’à souhaiter une certaine forme d’abandon
pour permettre à l’enfant d’accéder à l’autonomie ? Je répondrai que oui,
au moins de manière symbolique : en effet, dans sa vie fœtale et ses
premiers mois après la naissance, l’enfant vit en union ou en fusion avec sa
mère, il ne ressent pas de séparation entre « toi » et
« moi », c’est-à-dire entre le monde extérieur et lui-même. C’est peu
à peu qu’il va apprendre à se séparer du monde extérieur, à mettre une distance
entre « moi », « toi », puis « lui » et
« eux ». Dans ce processus, soit dit en passant, la figure du père
joue un rôle important, comme symbolique de la séparation. Plus tard, pour
permettre à cette évolution de se dérouler normalement, il sera nécessaire de
marquer la distance entre parents et enfants et d’encourager ceux-ci à
l’éloignement. Pour leur apprendre à se séparer de façon sereine et confiante,
sans crainte d’être abandonnés : par exemple en leur laissant des moments
de solitude dans la semaine, en les encourageant à dormir de temps en temps
hors du domicile dans une autre famille, en allant passer des vacances seul
ailleurs qu’avec les parents, etc.
Voilà des exemples d’action préventive concernant les
enfants pour leur éviter – peut-être, car on ne maîtrise pas tout – d’éprouver
un fort sentiment d’abandon une fois adultes. Mais que faire quand on l’éprouve
soi-même ? Une façon de combattre ce sentiment d’abandon consiste à
améliorer son image de soi, développer sa confiance en soi, apprendre à gérer
ses émotions lorsqu’elles s’avèrent trop intenses. Pour cela, on peut avoir
recours à des outils de développement personnel, seul ou en groupe.
Un travail avec un psychologue, un psychothérapeute ou
encore une psychanalyse pourront permettre une exploration plus approfondie
afin de déceler l'origine de cette peur d'être abandonné et d’apprendre à
l’apprivoiser. Car je peux aussi apprendre à accepter ma partie blessée, à la
nommer, à la reconnaître sans en avoir honte et à la réinscrire dans mon
histoire personnelle aujourd'hui.
Construire sa vie
Evénements et résilience
Renaud CHEREL
Vous pouvez lire aussi dans ce blog des articles sur la même thématique :
Guérir: guérison active et guérison passiveConstruire sa vie
Evénements et résilience
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire