Dans la vie ordinaire, il nous arrive, parfois
volontairement et parfois sans nous en rendre compte, de manier le paradoxe ou
de nous trouver dans des situations paradoxales. Je veux parler ici des
paradoxes au sens de contradictions logiques, au moins dans leur apparence.
Voici d’abord quelques affirmations paradoxales :
- « Cette proposition est fausse » : si la proposition est
fausse, ce qu’elle affirme est vrai, donc elle n’est pas fausse.
- « Je suis un menteur » : si je suis un menteur, mon affirmation
est vraie, donc je ne mens pas : je ne suis pas un menteur.
On voit là une propriété de tous les paradoxes logiques, à savoir la
circularité.
Certaines situations paradoxales peuvent avoir des
conséquences graves. Quand Léon ordonne à sa fille : « Sois
spontanée ! », c’est une demande évidemment impossible à tenir :
si Roseline obéit à son père, elle n’est plus spontanée. L’injonction
paradoxale, étudiée par Gregory Bateson sous l’appellation double contrainte,
consiste à placer une personne entre deux obligations contradictoires, la
première étant consciente et l’autre non. Ces situations peuvent avoir des conséquences
très négatives pour la personne qui y est soumise. Et pourtant, nombre de
parents, parfois sans s’en rendre compte, soumettent leurs enfants à des
situations de ce type.
On trouve également des doubles contraintes dans le cadre du
travail. Par exemple, la situation de Paulette dont la charge de travail est
devenue tellement importante qu'elle n'est plus capable d'y faire face. Si elle
fait une partie de son travail, elle sait qu'une autre tâche ne sera pas
réalisée. D'un autre côté, si elle ne le fait pas, ce ne sera pas fait. Et si
elle travaille d’arrache-pied pour concilier le tout en sacrifiant sa vie
privée, sa hiérarchie, considérant qu’elle est capable de le faire, lui
ajoutera une nouvelle tâche : c’est un cycle sans fin, dont elle risque de
sortir par un burn-out, un épuisement physique, émotionnel et mental.
D’autres propositions paradoxales plus générales, comme
« il est interdit d’interdire », ou bien « il ne faut jamais
dire jamais »… s’avèrent moins toxiques, parce que la personne qui y est
soumise est dans une relation moins intense émotionnellement (dans le cas de la
relation parent-enfant), ou avec des enjeux moins forts (risque de perte
d’emploi) que dans la double contrainte.
Il peut aussi arriver que l’on s’empoisonne la vie par des
auto-injonctions paradoxales, du genre « je dois prendre du plaisir »
ou « il faut que je sois heureux ». En se donnant à soi-même pour
obligation d’atteindre un état censé naître spontanément, on a peu de chances
d’atteindre l’objectif fixé.
Autre situation : Maxime, en rentrant du travail,
déverse sa tension et sa mauvaise humeur sur sa compagne, Tessa, alors qu’il
affirme l’aimer plus que tout : paradoxalement, c’est auprès de ceux qui
leur sont les plus proches que beaucoup de gens vont consentir à exprimer leurs
émotions les plus négatives.
Alors, peut-on se sortir des situations de paradoxe ?
Nous examinerons
un certain nombre de moyens dans le prochain message.
Renaud CHEREL
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