-« Je ne comprends pas qu’on puisse claquer son salaire
en restaurant ou en frivolités ! s’exclame Suzette. Une fois le plaisir
passé, il ne reste rien. Mon plaisir à moi, c’est de mettre de l’argent de côté
chaque mois pour alimenter mes comptes épargne. Ainsi, je suis certaine de pouvoir
faire face en cas de coup dur. Et puis pour moi, pas question de vivre à crédit
ou, pire encore, de me trouver à découvert !
- Moi, je ne suis pas avare, mais j’ai le sens de l’économie,
c’est tout, lui répond Nina. Ce qui m’importe c’est de dépenser mon argent au
mieux en faisant de bonnes affaires. Je me sers d’Internet pour comparer les
prix, recevoir des échantillons gratuits, profiter des bons d'achat, des réductions,
gagner des produits gratuits, profiter de prix dégriffés, etc.
- Nous vivons dans une société de gaspillage incroyable.
Je ne veux pas de cette hyperconsommation qui est en train de tout polluer et
de pourrir la Terre, explique Vladimir. Avec mon amie, on cherche à consommer
mieux pour produire le moins de déchets possibles. On préfère récupérer les objets,
les réparer et les recycler quand c’est possible, plutôt que toujours acheter
du neuf, et on pratique le troc entre particuliers pour les objets dont on n’a
plus besoin. On peut très bien vivre heureux en consommant moins. »
Le philosophe grec Théophraste distinguait l’avarice, qui
est une épargne excessive, de la radinerie qui est un manque de prodigalité. Autrement
dit, l’avarice met davantage l’accent sur la passion d’accumuler les richesses
et la radinerie sur celle de les retenir. Aujourd'hui, les deux mots ont un
sens à peu près équivalent qui se rapporte à un attachement excessif à
l’argent.
Ceci étant dit, la radinerie est aujourd'hui une attitude
assumée et revendiquée qui est apparue en France dans les années 2000, suite à
une tendance émergée quelques années plus tôt aux États-Unis. Le contexte de
baisse du pouvoir d’achat et de hausse des prix aggravé par la crise de 2008 a
accentué cette tendance, vite intégrée d’ailleurs par les stratégies marketing
de nombreuses marques.
Comme pour beaucoup de traits de caractères, c’est l’aspect
excessif de celui-ci qui devient problématique. Avoir le sens de l’économie, bien
savoir thésauriser, conserver, organiser et classer, c’est une bonne chose. Par
contre, si cette tendance nous gâche la vie et celle de notre entourage, cela
vaut la peine de réévaluer notre comportement. D’une part, le manque de générosité
peut poser des difficultés à nos proches et les faire souffrir ; d’autre
part la rétention de l’argent peut s’accompagner d’une tendance à limiter les
contacts avec les autres, à se renfermer sur soi-même, à vivre en vase clos.
D’où vient cette tendance à l’avarice ? Plusieurs
causes sont évoquées par les spécialistes : elle peut être liée à des privations
survenues dans l’enfance, à la peur de mourir, à un réflexe de compensation
face à un sentiment de vide intérieur…
Nous pourrons examiner dans le prochain message comment sortir
de cette tendance.
Renaud CHEREL
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