Lors d’un stage de développement personnel, des stagiaires expliquent
leur façon habituelle de fonctionner. Marjorie raconte : « Depuis
toute petite, j’ai mis en place une stratégie d’adaptation. Je cherche à être
plein de personnages différents, et je peux jouer plusieurs rôles dans la même
journée. Je me pose toujours la question : "Qui j’ai en face de moi
et comment je vais me comporter par rapport à cette personne ?" Je me
situe par rapport à un rôle à jouer. »
Nathanaël adopte souvent des comportements assez semblables
à ceux de Marjorie : « Au fond, j’ai besoin d’être aimé, admiré. Et
pour y arriver, j’ai tendance à adopter les manières de faire de personnes que
j’admire et qui me servent de modèles. J’ai plusieurs modèles en réserve, si je
puis dire, et je choisis celui qui convient à la situation. »
Lucile approuve : « Pour moi, j’attache beaucoup d’importance
au diplôme, au titre ; je suis fière de le dire. Je m’identifie à ce qui
donne de l’image, ce qui donne de la sécurité, de l’identité, mais pas à ce que
je suis réellement, au fond… Vous et moi, on est des caméléons, en fait. On
cherche à l’extérieur des modèles de bons comportements. »
Marjorie, Nathanaël et Lucile utilisent un mécanisme de
défense particulier, l’identification, par le moyen duquel ils s’attribuent inconsciemment
des aspects d’autres personnes, qu’ils désirent posséder du fait de l’attrait ou
de l’utilité que ces aspects représentent pour eux.
Précisons qu’au cours de leur développement, la plupart des humains
passent par une phase d’imitation de modèles : les bébés acquièrent beaucoup
de savoir-faire par imitation, les enfants imitent leurs parents, les ados se
conforment à des modèles qu’ils admirent ou aux codes du groupe auquel ils appartiennent.
Mais, au fur et à mesure qu’il acquiert son autonomie, l’individu va progressivement
mettre en place ses propres échelles de valeurs, ses propres standards de comportement.
Il aura donc moins recours à l’identification.
Pourtant, certaines personnes continuent toute leur vie d’avoir recours à l’identification presque constamment. Il faut reconnaître que c’est un mécanisme de défense particulièrement efficace, comme l’explique Lucile : « J’aime changer de tenue ; mais changer de tenue, c’est s’adapter à son environnement. J’y fais gaffe, car je cherche à m’y fondre comme un caméléon : pour être acceptée dans un groupe, il faut prendre les critères de ce groupe-là. Pour moi, l’image, c’est faire bonne figure, montrer que je suis forte et non pas vulnérable. » Professionnellement, l’identification à un rôle – que ce soit le rôle du « bon » vendeur, du « bon » ouvrier ou du « bon » directeur – est très efficace et très valorisée par notre société.
L’utilisation d’un mécanisme de défense n’est pas mauvaise
en soi ; mais y avoir recours de manière excessive présente des risques. À
force de m’identifier à des modèles, à force d’imiter les autres, je risque de me
perdre moi-même, de ne plus être en contact avec mon vrai « moi ».
Alors, usez-vous ou abusez-vous de l’identification ?
Renaud Cherel
Renaud Cherel
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