L’apparence ne laisse jamais indifférent, et l’on a tendance
à juger favorablement les personnes au physique agréable. Cette association
spontanée et souvent inconsciente remonte aux temps les plus anciens : on
en retrouve de nombreux exemples dans l’Antiquité, et dans toute l’histoire du
Moyen-âge à nos jours. Dans la plupart des histoires traditionnelles et des
contes, les méchants sont laids et les bons sont beaux, et ces codes ont été
repris largement au cinéma et à la télévision. Quelques contes, comme « Le
vilain petit canard », « La belle et la bête », « Riquet à
la houppe » insistent bien sur le fait que l’individu laid n’est pas
forcément méchant ou bête. Mais ces exemples sont rares et même dans ces
contes-là, la beauté est implicitement liée aux qualités morales de la
personne : à la fin du conte, le petit canard s’avère être un beau cygne, la
Bête se transforme en prince charmant et Riquet devient beau par le charme de
la belle qui l’épouse.
Riquet à la Houppe (illustration J. Lagarde) |
- les belles personnes seraient plus sociables, avec
une sexualité plus épanouie ;
- elles seraient plus équilibrées, avec une meilleure santé mentale ;
- elles auraient plus d’autorité naturelle ;
- elles seraient plus intelligentes et leur opinion aurait plus de
poids ;
- etc., la liste est très longue ; au final les beaux seraient plus
heureux que les laids. La seule qualité non reconnue chez ces personnes, c’est
la modestie !
Cette tendance aux préjugés favorables à l’égard des beaux
est suffisamment forte pour avoir suscité de nombreux proverbes ou adage
destinés à les combattre, comme : « l’habit ne fait pas le
moine », ou bien : « tout ce qui luit n’est pas or ». Mais
dans la réalité, les stéréotypes demeurent très fortement ancrés, et la prime à la
beauté fonctionne dès l’enfance : les beaux enfants bénéficient de plus
d’attention et de bienveillance et sont privilégiés dès la maternelle par les
enseignants. Au cours de leur parcours scolaire, ils se trouvent plus stimulés
et récompensés. Un cercle vertueux s’enclenche : ces enfants acquièrent
une meilleure confiance en soi, qui à son tour leur permet de progresser
davantage que ceux jugés laids.
La discrimination se poursuit au-delà de l’école :
l’apparence extérieure influe lourdement sur les recrutements. Les
particularités physiques et l’aspect vestimentaire ont un poids variable selon
les métiers : ils jouent davantage pour des postes de commerciaux ou de
direction, moins pour des emplois administratifs ou de production. La beauté
joue aussi auprès des collègues de travail et des supérieurs hiérarchiques. Il
est vrai que les individus d’apparence agréable ont souvent développé des
qualités de confiance en soi et de séduction recherchées par les
employeurs ; mais on leur prête souvent
bien plus qu’ils n’ont...
Renaud CHEREL
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Bibliographie
Jean-François AMADIEU : Le poids des apparences - Beauté, amour et gloire, éd. Odile Jacob, 2011 (1ère édition 2002), Paris, 199 pages.
L'auteur, professeur de sociologie à l'université Paris-I, démontre chiffres à l'appui combien notre apparence physique influence notre réussite, aussi bien dans le domaine scolaire que dans la vie amoureuse, professionnelle ou politique.
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