Nous sommes à la fin de l’été, et déjà les feuilles de certains arbres changent de couleur, adoptant des tons plus dorés. Les feuilles commencent à tomber des arbres et à s’accumuler çà et là au gré des tourbillons de vent. Une feuille morte, ce n’est rien, rien du tout : j’en foule aux pieds des quantités sans même y penser. Chaque arbre porte des milliers de feuilles, et chacune d’entre elles est vouée à se dessécher et à disparaitre à l’automne.
Mais, ce matin, je m’arrête un instant pour contempler une feuille tombée d’un arbre à mes pieds ; je me penche un peu sur elle et me fais la réflexion : peut-être a-t-elle quelque chose à me dire, quelque chose à me raconter, cette feuille qui maintenant gît dans l’herbe mouillée, un peu fanée ?
D’abord, cette feuille-là, elle n’est pas rien du tout : c’est une feuille d’érable, une belle feuille bien dessinée, aux teintes mordorées, une de ces feuilles que les enfants ramassent pour décorer leurs cahiers. Elle a sa forme bien à elle avec ses petites pointes et son long pétiole. Non, décidément et contrairement à ce que j’avais pensé, elle ne ressemble pas tout à fait aux autres feuilles, elle a son originalité propre : il y a quelque chose d’unique dans cette feuille.
Ensuite, c’est vrai que j’aurais pu enlever cette feuille de l’arbre sans dommage ; d’ailleurs, elle est tombée naturellement, cette feuille. Cependant, il me faut bien admettre que sans elle et toutes ses sœurs, le bel érable qui me surplombe ne pourrait pas vivre. Une évidence s’impose à moi : même si chaque feuille a un rôle très modeste, ensemble, elles sont absolument indispensables. Ce sont les feuilles qui captent la lumière du soleil et qui, grâce à leur activité, fournissent l’énergie nécessaire à la vie de l’arbre. Chaque feuille est en réalité une sorte d’usine très complexe, une mini-centrale d’énergie très sophistiquée. Et puis, en dehors du fait que cette feuille est utile à l’arbre, je ne peux m’empêcher d’admirer son esthétique : elle est belle dans la régularité de sa forme et dans l’harmonie de ses couleurs.
Enfin, je pense à la vie de cette feuille : elle est née au printemps dernier, elle a grandi, elle a travaillé à la besogne pour laquelle elle a été faite puis, sa tâche accomplie, elle s’est arrêtée progressivement de fonctionner, passant du vert au jaune puis au brun. Avant de se détacher de sa branche, elle lui a transmis les sucres qu’elle avait accumulés, ne conservant que le strict minimum. Et après sa mort, sa substance formera l’humus dont se nourriront les racines de son arbre d’origine, ou d’autres plantes.
Finalement, cette humble feuille me dit beaucoup de choses sur moi-même… Ne suis-je pas moi aussi, comme elle, un individu parmi des millions d’autres ? Et pourtant je suis un être unique et merveilleux. Comme elle, j’ai ma beauté, qui peut être extérieure ou intérieure. Comme elle, j’ai une tâche à accomplir sur cette terre, et comme elle, je l’accomplis avec d’autres…
Renaud CHEREL
Voir aussi dans ce blog :
Ordinaire extraordinaire
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Si les feuilles et les arbres vous intéressent, voir aussi le blog Fleurs sauvages de Renaud Cherel.
Extrait du livre "Le petit prince"
Renaud CHEREL
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