-« Mon garçon ne réussit pas à l’école, soupire Priscilla, et c’est certainement de ma faute. Je ne suis pas une bonne éducatrice ; je ne suis pas assez présente pour lui faire faire ses devoirs et réviser ses leçons tous les soirs...
- J’ai encore sévèrement critiqué une de mes employées cet après-midi, se
dit Uriel, gérant d’une épicerie ; j’ai renvoyé la culpabilité sur elle,
mais pour être tout à fait honnête, est-ce qu’elle était suffisamment
formée ? C’est quand même moi qui suis responsable de ce qui se passe dans
mon établissement.
- Je réagis au quart de tour quand on me fait une réflexion, et après je
culpabilise de m’être mise en colère, remarque Solange ; je devrais réagir
autrement mais je n’y parviens pas.
- Je fais tout pour éviter le conflit, explique Léopold. J’ai beaucoup de
mal à dire non, et quand je le fais, je me sens coupable… Je me demande
toujours si je n’aurais pas pu éviter de blesser l’autre par mon refus… »
Qui n’a pas éprouvé un jour ou l’autre un sentiment de
culpabilité ? Même le criminel le plus endurci qui tue ou viole sans
regrets apparents peut se sentir coupable de quelque chose, par exemple de ne
pas avoir souhaité l’anniversaire de sa mère.
Le sentiment de culpabilité n’est pas inutile, loin de
là : il naît de la conscience d’avoir enfreint des lois, des règles, sans
lesquelles la société ne pourrait pas fonctionner : aucune société ne
permet que l’on tue, vole ou viole selon son bon plaisir. Vivre sans jamais
éprouver de culpabilité nécessiterait de pouvoir transgresser n’importe quelle
règle sans s’en sentir fautif, ou bien de vivre dans un monde sans aucune loi
ni règle. Pour appartenir au groupe, l’individu doit renoncer à la
toute-puissance de ses pulsions. La culpabilité est liée à notre conscience
morale qui fixe les frontières entre le bien et le mal, le permis et
l’interdit, et fait de nous des êtres responsables.
Malheureusement, nous allons souvent trop loin : nous
nous punissons pour des désirs ou des pensées qui contrarient les attentes de
nos proches et de la société, autant que pour nos fautes réelles. Certains se
persécutent par une culpabilité dont, la plupart du temps, ils ignorent la
cause.
Bien sûr, nous faisons des erreurs et par conséquent il nous
arrive d’être coupables de façon objective. Mais développer un sentiment
général de culpabilité est inutile et toxique. La culpabilité inconsciente est
un poison qui peut empoisonner toute notre existence. Or, on n’est jamais
coupable pour avoir transgressé un interdit que l’on ne connaissait pas. Et par
ailleurs, rappelons-nous qu’aucun être n’est assimilable à son acte, alors que
nous faisons souvent l’amalgame : le fait d’avoir volé ne fait pas de cet
individu un voleur, pas plus que d’avoir menti, un menteur. Il convient de
réprouver l’acte et non la personne, de sanctionner la faute et non son auteur.
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