Réflexions d'un coach spécialisé dans les transitions, à partir des événements et rencontres de la vie quotidienne...

lundi 26 octobre 2015

Tutoiement et vouvoiement

« Pouvez-vous me donner les horaires des trains pour Lyon ? » demande Paloma à l’employé SNCF.

Valéry passe devant un SDF dans la rue et celui-ci lui lance : « T’as pas un euro ? ».

Simon a rendez-vous avec le directeur de son entreprise et le salue : « Bonjour Monsieur Dupont. Vous m’avez fait demander ? »

Marion, quatre ans, s’adresse à une dame inconnue : « T’as vu ma poupée, comme elle est belle ? »

Le français est une des langues où l’on peut choisir entre tutoyer ou vouvoyer un interlocuteur, comme on peut aussi le faire en espagnol et, dans une certaine mesure, en italien. Par contre, en anglais, cette possibilité n’existe quasiment plus, le pronom thou ayant pratiquement disparu au profit de you.

Concernant la langue française, l’usage du ‘tu’ et du ‘vous’ a beaucoup évolué selon les époques. Aujourd’hui, le tutoiement est de plus en plus répandu, notamment parmi les jeunes générations, peut-être sous l’influence de la langue anglaise, mais aussi probablement selon l’évolution des rapports interpersonnels dans notre société.

Classiquement, dans notre culture, le tutoiement marque davantage la proximité du lien ou l’intimité, il signifie moins de formalité dans les contacts. Il est plus facilement utilisé quand il y a parité des niveaux : entre ados, en famille, entre collègues, entre membres d’une même association ou d’un même groupe social.

A l’inverse, le vouvoiement est davantage utilisé pour signifier une certaine distance : vis-à-vis des inconnus, des gens que l’on connaît peu ou mal, ou bien ceux qui appartiennent à des univers différents du nôtre. Le vouvoiement peut aussi marquer formellement le respect envers l’interlocuteur ou sa fonction, ou la hiérarchie.

En apprenant à parler, l’enfant tutoie tout le monde ; c’est en grandissant qu’il apprend à discerner les personnes à vouvoyer, et celles qu’il peut tutoyer. À l’inverse, chez l’adulte, le passage du ‘vous’ formel au ‘tu’ informel est un rituel qui marque l’évolution de la relation vers plus de proximité. Ce changement est instantanément perceptible : il se produit alors une espèce de décontraction mentale et physique, qui transforme les comportements des deux personnes en présence. Ce passage se fait plus facilement quand une certaine parité est perçue entre les interlocuteurs : par exemple entre personnes du même sexe ou d’âge voisin.

Cependant, d’autres significations se sont progressivement attachées au tutoiement, probablement sous l’influence du jeunisme ambiant. Tutoyer, c’est se montrer jeune, dynamique, tourné vers l’avenir, sans formalisme… Par réaction, le vouvoiement peut apparaître comme porteur de valeurs plus classiques, voire même véhiculer une certaine pesanteur ou un immobilisme dépassés. Cela s’est marqué dans le domaine professionnel : on notera que les premières entreprises à généraliser le tutoiement ont été celles qui cherchaient à donner une image jeune, par exemple dans les média, la publicité ou les nouvelles technologies. Par contraste, le vouvoiement, qui peut apparaître comme la marque d’un certain formalisme, a résisté davantage dans des entreprises plus traditionnelles, la finance, ou des industries anciennes.

Nous verrons dans le prochain message comment choisir entre tutoiement et vouvoiement.


Renaud CHEREL


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