L’autre matin, je suis allé faire un tour dans la forêt qui
s’étend non loin de chez moi ; il faisait froid mais beau et, chemin
faisant, je fus émerveillé par la quantité de champignons tout frais sortis de
terre, qui étincelaient dans les rayons obliques de ce soleil d’automne. Je fus
frappé en particulier par l’élégance de quelques coprins pies dont la
robe en noir et blanc éclaboussait d’une grâce fragile le fossé d’une route
forestière. Je me promis de revenir avec mon appareil photo pour en
immortaliser quelques-uns.
Coprin pie (photo R. Cherel) |
Peut-être, mais cela ne m’empêche pas de me poser des
questions sur les comportements humains : l’individu qui a commis ce crime
infime avait-il besoin de dissiper son énergie, ou bien d’évacuer son
stress ? Pourquoi ce geste de destruction gratuite, aux dépens d’un être
vivant qui ne lui avait rien fait ? Je ne peux pas répondre à ces
questions, bien sûr ; mais je ne peux m’empêcher de penser que ce type de
comportement est l’indice d’une violence bien plus générale. Faut-il le dire,
ce n’était pas la première fois que je constatais de tels comportements :
je me souviens par exemple d’une fine toile d’araignée aperçue un matin le long
d’un chemin, scintillant au soleil avec ses gouttes de rosée comme autant de
joyaux, miracle fragile de beauté éphémère. Je décidais de la prendre en
photo ; mais le temps de retourner chez moi pour chercher mon appareil,
lorsque je revins sur les lieux une demi-heure après, la petite merveille avait
disparu et la branche qui la soutenait gisait sur le sol, brisée et piétinée.
Pourquoi faut-il que certains d’entre nous éprouvent depuis
l’enfance ce besoin de détruire systématiquement ce qui est fragile et
vulnérable ? Que dire du comportement banal de ces enfants qui fouettent
les feuilles des arbres avec un bâton pour les réduire en bouillie, ou écrasent
à coups de talon des insectes qu’ils ont pu attraper ? Quelle jouissance
se cache-t-elle sous ces comportements ? Serait-ce lié au fait que ce qui
est différent nous insupporte ? Est-ce en raison d’une sensation diffuse de
notre propre vulnérabilité, qui nous pousserait à détruire plus vulnérable que
nous ?
Nous en reparlerons dans le message suivant.
Ce message vous a plu ? Vous pouvez voir aussi dans ce blog :
Pourquoi la violence ?
Sur la défensive
L'agressivité passive, mécanisme de défense
Renaud CHEREL
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